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Les juridictions administratives ont à de nombreuses reprises rappelé que la Charte des thèses a bien une valeur règlementaire, bien qu'un certain nombre des procédures ne soient pas obligatoires, et que les doctorants ne peuvent exiger qu'elles soient mises en œuvre. Cela n'empêche toutefois pas que les dispositions de la charte des thèses doivent être respectées par les différents acteurs : doctorant, directeur de thèse, président d'université.
Cette page commente les éléments de jurisprudence concernant l'aspect règlementaire de la charte des thèses.
Un docteur en droit ayant obtenu la mention très honorable s'est vu deux fois de suite refuser la qualification par le CNU, sa thèse ne présentant pas une valeur académique suffisante et parce qu'il n'avait pas d'expérience suffisante en matière d'enseignement. Il saisit le juge administratif d'une action en responsabilité contre l'université aux motifs qu'il n'aurait pas bénéficié d'un encadrement doctoral digne de ce nom et qu'on avait refusé de le recruter à des fonctions de chargé de TD ou d'ATER sans motif valable.
Le docteur reproche à l'université trois points, dont le suivant : il soutient que l'université n'aurait pas rempli les obligations qui découleraient de la charte des thèses, notamment en ne précisant pas les objectifs personnels et professionnels de sa thèse, en ne lui donnant pas d'informations suffisantes, en n'assurant pas un encadrement et un suivi suffisant par son directeur de thèse.
Le juge administratif rejette sa demande en relevant que même si ces manquements étaient établis, le docteur ne prouve pas qu'ils soient la cause du rejet de sa demande de qualification à la maîtrise de conférence.
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Une docteur agit en responsabilité contre l'université en raison des manquements de son directeur de thèse. Celui-ci, après avoir assuré à la doctorante que son travail était excellent, que la soutenance pourrait avoir lieu en octobre 1998, le jury étant constitué et les rapporteurs ayant rendu des rapports favorables, a brutalement cessé tout contact.
La doctorante a appris par le secrétariat de l'université qu'elle devait reprendre une partie de son travail, un membre du jury, proche de la directrice de thèse, dont les théories étaient critiquées par la thèse ayant fait savoir qu'elle n'était pas en état d'être soutenue et qu'il ne voulait plus faire partie du jury.
La doctorante a fini par soutenir sa thèse, dans un autre établissement, en 2002. Entretemps, la thèse n'a subi aucune modification entre 1998 et 2002, et a obtenu les félicitations du jury et la mention très honorable à l'unanimité.
Le juge administratif relève que le principe d'indépendance des professeurs de l'enseignement supérieur fait obstacle à ce que le juge se prononce sur les appréciations pédagogiques portées par un professeur de l'enseignement supérieur, directeur de thèse, sur la qualité du travail de son doctorant. En revanche, le comportement du directeur de thèse en l'espèce repose sur des considérations étrangères à une toute appréciation scientifique, et qu'il constitue donc une faute de nature à engager la responsabilité de l'université.
Le dommage subi par la doctorante est évalué à 3000 euros. L'université est également condamnée à payer les dépens et à verser à la partie adverse 1500 euros au titre des frais irrépétibles.
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La charte des thèses n'a pas valeur contractuelle. Cette affaire est l'occasion pour les juridictions administratives de le réaffirmer.
Le directeur de thèse, suivi en cela par le président de l'université, avait mis fin au travail de recherche, dans des conditions telles que sa décision avait été annulée par le juge administratif. La doctorante avait pu se réinscrire et être réintégrée dans le laboratoire, mais elle avait perdu le bénéfice de sa bourse de recherche.
La doctorante demande au juge administratif de condamner l'université à prendre en charge sa couverture sociale et le versement de sa bourse en se fondant sur la charte des thèses.
Le juge rejette sa demande en relevant que la charte des thèses n'établit pas de relation contractuelle entre le doctorant et l'université, et que par ailleurs, il n'existe pas de disposition légale permettant de condamner l'université.
En outre, le juge administratif applique l'article 761-1 du Code de justice administrative : «Dans toutes les instances, le juge condamne la partie tenue aux dépens ou, à défaut, la partie perdante, à payer à l'autre partie la somme qu'il détermine, au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Le juge tient compte de l'équité ou de la situation économique de la partie condamnée. Il peut, même d'office, pour des raisons tirées des mêmes considérations, dire qu'il n'y a pas lieu à cette condamnation».
En équité le juge administratif a donc estimé qu'une doctorante qui a perdu sa bourse de recherche du fait de la décision des instances universitaires de mettre fin à ses travaux doit en outre être condamnée à verser 1500 euros à l'université de Paris 6 et 1000 euros à l'INSERM.
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Un directeur de thèse conteste la décision par laquelle le président de l'université avait désigné un autre directeur de thèse à l'issue des procédures prévues par la charte des thèses.
Le juge administratif rejette la requête en relevant que les usagers du service public de l'enseignement supérieur et de la recherche que sont les doctorants sont placés dans une situation réglementaire et que la charte des thèses s'applique à eux, notamment en ce qu'elle prévoit des procédures de médiation, qui bien que facultatives, habilitent le président de l'université à prendre en définitive la décision de désigner un nouveau directeur de thèse.
Le directeur de thèse est condamné aux dépens, il ne semble pas que l'université ait formé de demande au titre des frais irrépétibles.
En savoir plus :
Les requérants contestaient l'arrêté de 1998 établissant la charte des thèses. Le Conseil d'État indique que «la charte-type se borne à rappeler et commenter certaines des dispositions fixées par l'arrêté du 30 mars 1992 relatif aux études de troisième cycle, ainsi qu'à préciser certaines modalités de la préparation, de la soutenance et de la valorisation de la thèse; qu'elle ne contient aucune disposition qui imposerait de nouvelles obligations de caractère statutaire aux enseignants-chercheurs» et que, «dès lors, les requérants ne sont pas fondés à soutenir que l'arrêté attaqué aurait été pris par une autorité incompétente».
Le Conseil d'État indique également que «en énonçant que la charte des thèses est signée notamment par le directeur de thèse et par le doctorant, l'arrêté attaqué n'a pas pour objet et ne pourrait d'ailleurs avoir légalement pour effet d'établir une relation de nature contractuelle entre les signataires». L'absence de valeur contractuelle de la charte des thèses est donc affirmée dès l'origine.
Enfin, le Conseil d'État estime que la procédure de médiation prévue par la charte «dépourvue de tout caractère obligatoire, doit être mise en oeuvre «sans dessaisir quiconque de ses responsabilités»; qu'ainsi, les requérants ne sont pas fondés à prétendre que les dispositions précitées porteraient atteinte au principe de l'indépendance des enseignants-chercheurs».
On peut l'interpréter comme signifiant que l'indépendance des enseignants-chercheurs concerne l'appréciation scientifique et qu'un directeur de thèse qui en mésuserait sortirait du cadre de ses prérogatives, et pourrait dès lors être sanctionné par la nomination d'un autre directeur de thèse par le président de l'université.
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) a été mis à jour le 17 juin 2009