Logo de la CJC
Document tiré de : cjc.jeunes-chercheurs.org/interventions/intersyndicale/1997-06-28/cr-sncs.html
anniv Enquête sur les jeunes chercheurs étrangers en France : résultats et solutions En savoir plus….
Retrouver la proposition de loi de la CJC pour une juste représentativité des Jeunes Chercheurs En savoir plus….

Compte-rendu de réunion intersyndicale par le SNCS, 28 juin 1997


Entrevue de l'Intersyndicale avec le Ministre, ses déclarations au Conseil d'Administration et ailleurs...

ENCOURAGEANT...MAIS

Dans ce texte, nous donnons un certain nombre d'informations (et de commentaires) relatives aux diverses déclarations de notre nouveau ministre, Claude Allègre. Les informations et citations proviennent essentiellement de ses déclarations lors du Conseil d'Administration du CNRS (19/6) et de l'entrevue avec l'Intersyndicale nationale de la Recherche et de l'Enseignement supérieur (28/6). Plutôt qu'un compte rendu factuel de ces deux réunions, nous avons tenté de faire une synthèse par sujet en y ajoutant des commentaires.

La Recherche est devenue " priorité nationale ". Le ministre annonce une vraie inversion de tendance. Les premières mesures vont dans ce sens. Même s'il n'est pas encore connu, il est probable que le prochain budget le confirme.

Mais certains propos du ministre sur l'évaluation et les instances scientifiques ne vont pas du tout dans le sens que nous défendons. Nous le lui avons dit. Nous le redirons dans les commissions de travail qui se réuniront tout l'été.

.../...

A Propos d'Allègrement...

Le jour où ce compte rendu était écrit, paraissait dans " La Recherche " un édito intitulé " Allègrement ", rédigé assez sournoisement pour que de nombreux lecteurs l'interprètent comme l'exposé des véritables intentions du nouveau Ministre de l'Education Nationale et de la Recherche.

En fait cet éditorial ne reflète que les positions de " La Recherche " et des lobbies manipulateurs qui ont pu l'inspirer. L'attitude du SNCS reste dictée par les actes et les déclarations des responsables gouvernementaux, avec la volonté de jouer tout notre rôle de syndicat défenseur des intérêts de la Recherche et des chercheurs.

Le Bureau national EMPLOI SCIENTIFIQUE

C'est, comme nous le souhaitions, la grande priorité du ministre qui se manifestera par l'élaboration d'un plan pluriannuel et par des mesures immédiates visant à commencer à répondre à la situation de " dix mille jeunes docteurs sans emploi ".

Un plan pluriannuel pour l'emploi scientifique

Ce plan pluriannuel, qui est à élaborer dans la concertation, concernerait pour le moins les EPST et les universités. Il se baserait sur les départs en retraite programmés, les incitations à la mobilité volontaire, des recrutements effectués par anticipation et gagés sur les départs massifs des prochaines années comme les créations d'emplois souhaitables. Si aucun chiffre n'a été donné, la presse indique, par exemple, un nombre de deux mille créations de postes de Maître de Conférence par an contre 600 à 900 entre 1993 et 1997. Ce plan de recrutement serait pour partie financé par la transformation en emplois budgétaires des heures complémentaires (soit deux milliards de francs) dès la rentrée. La mobilité volontaire des chercheurs est pour le ministre à favoriser tant vers l'industrie que vers l'enseignement supérieur (en particulier vers 45-50 ans). Dans ce dernier cas, le ministre estime qu'on n'a pas tiré le meilleur parti de la titularisation qui visait notamment à faciliter les échanges entre chercheurs et enseignants-chercheurs. Des emplois universitaires seront affectés à la mobilité des chercheurs, et ce, dans un contexte de croissance des emplois universitaires. Le mécanisme est à discuter mais pourrait être le suivant : le chercheur serait " détaché deux ans puis intégré dans le supérieur avec une promotion " (de grade ?). Enfin, les aides de l'Etat, pour la recherche, aux grandes entreprises seront fortement abaissées et les "marchés d'Etat " prendront en compte les problèmes d'emploi, notamment l'embauche de docteurs (récents ou en mobilité).

Le SNCS demandait un tel plan avec des modalités identiques ou similaires à celles proposées. Il reste à négocier l'ampleur du plan. Le SNCS demande un taux annuel de 5% de l'effectif pour le recrutement des chercheurs et ITA. Ce taux apparaît hautement souhaitable pour transmettre savoir et savoir-faire dans de bonnes conditions et ce, jusqu'à la période où les départs à la retraite seront importants (3 à 4 ans).

Des " décrets d'avance " dans l'immédiat

- Pour les EPTS, pour le moins, les postes de chercheurs supprimés en 1997 seront rétablis ; - Il y aura probablement aussi le rétablissement d'une partie des emplois d'ITA supprimés mais le ministre considère que certains secteurs sont bien dotés et d'autres très pauvres. Il veut donc étudier la question. - De nouveaux ATER (et des bourses post-doctorales ?) seront créés afin de faire le lien avec les créations budgétaires d'emplois dans les universités. - Enfin, plus de 300 allocations de recherche seront rajoutées au budget 1997

a) Bien que cela n'ait pas été explicitement dit, l'ajout de postes dans les EPST se fera pour tout ou partie par redéploiement d'une partie du financement prévu pour 1997 pour les programmes. Si on ne peut que se féliciter de ce signe de la priorité à l'emploi, il reste que pour le budget 1998, un effort sur les moyens sera indispensable. b) La situation reste floue sur le problème des universitaires, les procédures dans ce secteur rendant plus difficile les " rallonges " de poste en cours d'année. Mais s'il y a suppression des heures complémentaires à la rentrée, il faudra bien que le ministère trouve une solution. c) L'amélioration des carrières ne semble pas prévue dans les décrets d'avance (" priorité à l'emploi "). La discussion se fera sur le prochain budget.

Doctorants et post-doctorants

Le ministre a indiqué que les allocations de recherche ne devaient pas être utilisées comme substitut aux emplois de chercheur comme le font par exemple certains centres parapublics. Il a dénoncé l'utilisation des thésards dans des conditions sociales lamentables. Pour lui, " les thésards relèvent des seules universités ". Il a évoqué la création d'une " Fondation " pour gérer les allocations, en s'inspirant du système japonais, qui serait financée par l'Etat et des entreprises, sans qu'il soit précisé si toutes les allocations seraient ainsi gérées. Enfin, au CA du CNRS, il a annoncé la création de nouvelles bourses post-doctorales mais n'a pas précisé s'il s'agissait d'un palliatif temporaire vu le nombre de docteurs au chômage, d'une vision structurelle quant au mode d'insertion dans la recherche et/ou d'un début de rapprochement avec la situation existant dans d'autres pays d'Europe.

a) La phrase " Les thésards relèvent des seules universités " est ambigu&ediaer;. Prise à la lettre, elle exclue les thésards des formations propres. b) S'il adhère entièrement à la volonté de réduire le nombre de jeunes docteurs au chômage, le SNCS estime qu'il serait dangereux de créer de nouvelles bourses post-doctorales ou ATER sans un bilan sérieux de la situation actuelle et sans vision claire de l'avenir des bénéficiaires et rappelle qu'il est hostile à la précarisation de l'emploi comme au recrutement majoritaire au niveau CR1.

POLITIQUE DE RECHERCHE

Crédits

Avec l'emploi, les crédits récurrents des laboratoires est la priorité du ministre. Ceux-ci devraient être augmentés par : - le redéploiement partiel de crédits de programmes, le taux de programmes étant jugé excessif ; - une pause d'un an sur les grands équipements (" SOLEIL ") avec nécessité de rechercher des partenaires européens par la procédure EUREKA, - un redéploiement d'autres crédits pouvant être hors BCRD (on ne sait s'il s'agit du " crédit d'impôt "), - une augmentation globale des moyens.

Contractualisation

- le contrat d'objectifs de l'INSERM, qui était en cours de discussion est " gelé ", - la contractualisation des universités impliquerait à terme l'Université, le CNRS, le Ministère ainsi que les collectivités locales et des industries (information donnée aux Présidents d'Université).

Le gel du contrat d'objectifs de l'INSERM, demandé par le SNCS au Ministère, est une victoire importante. Pour le reste, le SNCS est favorable à une remise à plat des relations entre organismes et universités.

Missions et " contours " des organismes

- Il a été demandé aux directions d'organismes de proposer une redéfinition des missions de chacun d'eux. La question du nombre d'organismes est posée (" N'y a-t-il pas trop d'organismes distincts ? "). Sans que le Ministre l'ait explicité, il semble qu'il s'agisse de l'ORSTOM, peut-être du CEMAGREF, du CIRAD, sans que cette liste soit limitative. Le contour des organismes doit aussi être discuté (" Est-il nécessaire qu'il y ait de la biologie moléculaire fondamentale au CEA ? ") ; - Cela ne signifie pas qu'on aille vers une hyper-spécialisation des organismes comme en témoignent les déclarations du Ministre au CA du CNRS : " Je ne crois pas à la notion de double emploi, on peut aborder la même question de façons très différentes " ; " Certains considèrent que cela pose problème d'avoir des chercheurs CNRS et INSERM dans un même labo, moi pas " ; - Le ministre a l'intention " d'obliger les directions d'organisme à se concerter, s'il y a accord tant mieux, sinon chacun reprend ses billes ". Enfin, " il faut envisager, mais sans fusion, un rapprochement entre grands organismes et Université ".

Le système français étant constitué de couches sédimentaires successives, les questions posées ne sont pas illégitimes. Elles demandent réflexions et négociations. Elles posent des problèmes de fond. Ainsi, le SNCS serait totalement hostile à ce que la frontière entre le CNRS et l'INSERM corresponde à une répartition entre recherches fondamentales et finalisées.

Gestion

- " Les laboratoires doivent être le centre du dispositif de recherche ". Ceci suppose que leurs crédits récurrents soient corrects. Leur évaluation doit être d'abord basée sur leur production au cours des dernières années et beaucoup moins qu'aujourd'hui sur leurs projets. - " La recherche doit être débureaucratisée ". " Le poids des programmes doit diminuer ", " Il doit y avoir primauté des Directeurs scientifiques sur les administratifs, notamment au CNRS ". Des journalistes font état d'un projet (crédible visant à alléger de moitié l'Administration du CNRS et à transférer la gestion locale aux universités. Malheureusement, le concept de " débureaucratisation " semble englober, dans l'esprit du Ministre, les instances d'évaluation.

a) Si on veut " débureaucratiser ", il conviendrait d'abord d'alléger la gestion, donner plus de responsabilités aux équipes et avoir le contrôle a posteriori et non a priori. b) tout transfert éventuel de compétences en matière de gestion demande au préalable de redéfinir les relations scientifiques et juridiques des entités concernées. c) Il pose aussi des problèmes de fonctionnement rapide des services financiers et celui des taux prélevés sur les rentrées sous couvert de gestion.

Recherche et industrie

- L'aide aux PME, pour la recherche, sera accrue ; celle aux grandes sociétés diminuera ; - Des formules de " Capital-risque " pour l'innovation seront mises au point avec les assurances ; - Les chercheurs seront encouragés à créer des entreprises valorisant leurs découvertes ; - Sur deux ou trois sites en France, des expériences type " Route 128 " (mise en contact de labos publics, de centre de recherche privés et de PME innovantes) seront mises en place.

La recherche industrielle est le point le plus faible de la recherche française. C'est bien l'ensemble du dispositif qui est à revoir : investissements de l'industrie, aides de l'Etat, Centres techniques, formation par la recherche, interactions avec la recherche publique, etc.

Europe

Bien que cela ne soit pas directement explicité, les vues du Ministre semblent aller toutes vers le renforcement des échanges et coopérations (grands équipements) en Europe et de l'évaluation croisée entre pays (" il faut créer un système d'évaluation européen "). Il semble vouloir aller dans le sens d'un rapprochement du système français de celui des autres pays européens (post-docs et surtout évaluation) mais en prenant aussi la mesure des lourdeurs actuelles de Bruxelles (" les responsables d'organismes et centres européens de recherche devraient avoir des contacts directs ").

Bruxelles est un bon exemple d'un système, sans aucune transparence, d'experts anonymes. Ce serait une bonne cible pour lutter contre la bureaucratie. A l'inverse de la situation actuelle, il faut favoriser l'émergence d'une communauté scientifique européenne ouverte sur le monde. Plus que des contrats ciblés, il faut impulser de vrais réseaux européens développant échanges et coopérations. Cette politique européenne devrait s'appuyer sur les politiques, organismes et instances nationales et non les ignorer.

EVALUATION

C'est le point négatif des diverses déclarations du Ministre qui, si elles ont varié dans la forme, reviennent toutes à mettre fortement en cause le rôle et la composition des actuelles instances scientifiques et à valoriser le rôle d'experts nommés. A savoir : - " Je veux les chercheurs dans les labos et non dans les commissions, les trains ou les avions " (lors de la passation des pouvoirs), - " Il faut une évaluation européenne des équipes, les chercheurs continuant à être gérés par des commissions paritaires " (sic, CA du CNRS), - " Il faut diminuer par deux le nombre de sections et par deux le nombre de chercheurs qui y sont " (rapporté à la radio), - " Il faut diminuer fortement le nombre de commissions pour favoriser l'interdisciplinarité " (entrevue intersyndicale), - " Je ne comprend pas pourquoi il y a des élus syndicaux dans les instances d'évaluation ".

a) Le ministre pose trois vraies questions (l'élargissement de l'évaluation, l'interdisciplinarité, une certaine lourdeur des instances) qui nécessitent une discussion approfondie. Il propose des solutions inappropriées qui rencontreront l'hostilité de 90% de la communauté scientifique. Ses propos seront par contre bien compris s'ils visent la multitude de Comités induite par la politique de programmes ;

b) l'évaluation n'est pas une olympiade ayant pour but de sélectionner les dix meilleures équipes d'un organisme. Elle doit assurer le bon fonctionnement de toutes, favoriser les évolutions thématiques, apporter aides et conseils et associer l'ensemble des scientifiques à la vie de l'organisme.

c) Le SNCS est totalement opposé au système, anonyme et sans transparence, des experts. Si les instances actuelles peuvent être améliorées, le principe électif de la majorité de leurs membres ne saurait, pour nous, être mise en cause.

d) La phrase " Je ne comprend pas pourquoi il y a des élus syndicaux dans les instances d'évaluation " signifie-t-elle qu'ils sont plus bêtes que ceux soutenus par un lobby ou un groupe de pression ? Sinon, veut-elle dire qu'il ne faut pas d'élus ?

e) Le SNCS considère que les mêmes instances doivent effectuer l'évaluation des équipes, celle des chercheurs et la prospective scientifique. Il souhaite que toutes les formations universitaires soient évaluées par le Comité national.

Syndicat National des Chercheurs Scientifiques
1, Place Aristide Briand
92195 MEUDON CEDEX
Tél. 01 45 07 58 70
Fax : 01 45 07 58 51
e-mail :sncs@cnrs-bellevue.fr
site WEB du SNCS : http://www.cnrs-bellevue.fr/~sncs/

facebook twitter

contact @ cjc . jeunes-chercheurs . org © 1996-2024 Confédération des jeunes chercheurs.

Ce document (/interventions/intersyndicale/1997-06-28/cr-sncs.html) a été mis à jour le 11 juin 2007

Politique d'accessibilité et mentions légales