cjc.jeunes-chercheurs.org/interventions/2002-salondulivre.html
Problème : nous n'avons pas vu les journalistes chargées du débat avant, et elles ne savaient pas qui étaient les représentants CEC (elles se sont même demandé si la CEC était bien venue : pourtant, nous étions au 1er rang, aux places réservées). Du coup, nous n'avons eu la parole qu'après 1h10 de débat (qui a duré en tout 1h3/4) : il a été difficile de faire passer les message (2 interventions, contre 4 à 5 pour les autres personnes présentes). Le manque de temps de parole ne permettait pas une bonne exposition des problèmes, alors que le débat était très grand public. Les questions d'organisation de la recherche étaient un peu trop techniques pour cette table ronde et j'ai (Fabienne) probablement parlé de points trop pointus pour que ça passe bien.
Présents :
Pierre Joliot (Collège de France - biologiste)
Jean-Pierre Alix (UDF - directeur de La Villette)
Maryse Arditi (Vert - physicienne nucléaire)
Gérard Tobelem (RPR - biologiste et médecin)
Robert Damien (Pole Républicain - philosophe)
Arrivés en retard
Nicole Le Douarin (Collège de France - biologiste)
Hubert Curien (ancien ministre - physicien)
Roger-Gérad Schwartzenberg (qu'on ne présente pas...)
J'ai (Fabienne) insisté sur la nécessité de transformer les bourses en salaires : après la table ronde, une personne de la Fondation de France m'a dit que ce n'était pas raisonnable parce qu'alors, il n'y aurait plus de bourses (même si on trouve une structure intermédiaire pour gérer les salaires : "on ne peut pas fiscaliser les dons").
Question : la recherche est-elle suffisament en débat ?
M.A. : Non, pas assez. Pas de clivage droite-gauche, d'où une absence de débat car cela ne permettra pas aux électeurs de choisir. Position des verts ambivalente : méfiance face aux dangers d'une arrivée trop rapide des découverte dans le grand public (avant qu'on ne connaisse d'éventuels effets néfastes), mais espoir dans les progrès possibles.
G.T. : On ne parle pas assez de la recherche, malgré une attente des européens vis à vis de la science : le désengagement du politique dans ces questions est dangereux.
R.D. : Il faut que la recherche revienne au centre du débat public, et qu'elle ne soit pas la seule affaire des chercheurs. Objectivité, connaissance et contrôle sont des valeurs à remettre au centre des débats de société (l'information n'est pas suffisante pour se former un jugement).
P.J. : La recherche devrait être un domaine idéal pour le consensus entre politiques. Effectivement, il y a consensus, mais par le bas! Or la recherche fondamentale a besoin de moyens et de stabilité : les clivages politiques doivent être amortis pour permettre le long terme.
J-P.A. : Avant, il y avait accord entre politiques et scientifiques. C'est différent maintenant à cause des inquiétudes/craintes face à certaines découvertes.
M.A. : Il faut réorienter le développement, et demander à la recherche de trouver des ruptures technologiques pour résoudre les problèmes. Avant la science était celle apprise dans les écoles : fixée, rassurante. Mais les questionnements des scientifiques dans les labos sont arrivés sur la place publique : le citoyen demande alors à participer, puisqu'il y a doute.
P.J. : attention : il est dangereux de fixer des objectifs pour la recherche fondamentale. Avant de résoudre des problèmes, il faut les comprendre. On ne sait pas d'où viendront les réponses : cf les investissements massifs des américains pour la lutte contre le cancer dans les années 60. On meurt toujours du cancer aujourd'hui.
G.T. : d'accord avec Joliot : la découverte ne se programme pas. On peut tout au plus essayer de trouver la meilleure adaptation possible, mais on ne sait pas d'où viendront les sauts conceptuels/technologiques. Il ne faut pas noircir le progrès (1970 : 70% des enfants leucémiques mourraient ; 2000 : 70% des enfants leucémiques guérissent).
Q. : Comment créer l'articulation recherche/développement ?
R.D. : Il ne faut pas demander aux scientifiques plus que ce qu'ils peuvent donner : le vrai est différent du bien et du juste (ce sur quoi peuvent par contre s'exprimer les citoyens).
Nicole Le Douarin arrive
J-P.A. : Il faut lancer des politiques publiques : le % du PIB consacré à la recherche est en baisse continue depuis 10 ans, quelle que soit la majorité. Depuis le 11 septembre, relance dans les autres pays : il faut faire la même chose en France. Chance : 1 chercheur sur 2 va prendre sa retraite dans les 10 ans. Il faut donner des moyens aux jeunes chercheurs (les 10 000F - 20 000F donnés par le CNRS ne suffisent pas). Giscard : réflexion sur une politique générale de l'Europe. C'est le moment de demander un effort européen : grands programmes européens et crédits nationaux aux jeunes chercheurs.
M.A. : on ne parle que de la recherche fondamentale. Il y a un mépris pour la recherche appliquée. De plus, 2% de l'argent pour la santé publique : il faut rééquilibrer.
N. Le D. : Il ne faut pas opposer fondamental et appliqué. Il est impossible d'orienter le fondamental, mais c'est cette recherche qui sera à la base des applications. L'Etat doit financer le fondamental et favoriser les industries qui font le transfert vers l'appliqué (comme les firmes de biotechno).
Q. : Y a t'il une mauvaise mécanique public/privé ? National/international ?
N. Le D. : Il faut une politique européenne, mais cela n'empêche pas un meilleur financement national. Aux US, grand dynamisme depuis 3-4-5 ans en bio, grâce à l'interaction avec le privé. Fuite des cerveaux (dont des français) vers les US, massive en bio, car meilleures conditions de travail (ce n'est pas tellement un problème de salaire).
R.D. : Il y a une baisse du budget de la recherche depuis les années fastes Chevènement (où le budget recherche avait augmenté de 17%)
G.T. : Il n'y a pas de frontière étanche fondamental/appliqué. France = petit pays en terme budgétaire : pas de compétition possible avec les US. Il faut regarder au niveau européen, au sein duquel la France doit jouer un rôle moteur. L'Europe de la recherche est indispensable, y compris pour défendre des objectifs non-marchands (cf brevetabilité du vivant).
Q. : mais il y a déjà des programmes européens ?
P.J. : Il ne faut pas opposer fondamental et appliqué : les chercheurs devraient pratiquer les 2. Pour dépasser un verrou conceptuel (cf vache folle, sida etc.), il faut une recherche non-orientée. Statistiquement, en France, la recherche est un concept de gauche (sauf de Gaulle). C'est une spécificité française, et il faut dépasser ce clivage, pour arrêter les fluctuations de financement néfastes à la recherche (de plus, financement insuffisant même à gauche).
Arrivée de Hubert Curien
Q. : faible attractivité des sciences pour les étudiants (problème international) : comment y remédier ?
Arrivée de R-G. S. (il est 17h30 : on a déjà 1h de débat).
H.C. : Il faut rendre les sciences plus attractive : la chute du nombre d'étudiants, dans tous les cycles, est particulièrement dure à supporter en 3e cycle. Les sciences ne sont pas plus difficiles qu'autres chose : à faire passer dès le primaire. Il faut aussi des études supérieures plus ouvertes. On a déjà une bonne orientation dans les réformes des enseignements dans les écoles d'ingés, plus tournés vers l'humain et moins vers les machines. Le problème, c'est l'image de la science dans les média : on n'en parle qu'en cas de problème.
G.T. : Il faut agir à tous les niveaux, car risque pour l'avenir : l'effort de recherche par rapport à l'augmentation du PIB n'a cessé de baissé, depuis la fin des années 80.
R-G.S. : Vrai, car baisse des dépenses militaires, comme partout. Mais la France est le pays de l'OCDE qui consacre le plus d'argent à la recherche publique. C'est la recherche privée qui est à la traine. Cela commence à évoluer. A Barcelone, on a parlé de 3% du PIB pour la recherche, mais avec un effort demandé au privé.
N. Le D.: Aux US, l'Etat investit beaucoup, que ce soit une majorité démocrate ou républicaine. Mais aussi tradition de fondations dans les pays anglo-saxons, qui financent aussi le fondamental, dans une vision à long terme. Cf Welcome au Royaume Uni.
Q.: N'est-ce pas dangereux de déléguer aux fondations privées ?
R.D. : Oui, c'est pourquoi il faut l'encadrer. Le budget public de la recherche doit augmenter au niveau européen. Il faut aussi un effort de rémunération pour attirer les jeunes.
M.A.: OK avec R-G.S. sur la politique volontariste de l'Etat français en matière de recherche. Mais l'industrie française est à la traîne. De plus, il faut renforcer les sciences humaines : sociologie, sciences politiques sont utiles face aux questions de société comme l'insécurité. Question des départs à la retraite massifs : il faut une politique de recrutement dès maintenant pour qu'il puisse y avoir un temps d'adaptation pour la relève.
Q.: nous avons justement une représentante de la CEC qui va pouvoir nous parler de la question, après M. le Ministre.
RGS [hésitate, semble vouloir nous laisser la parole d'abord ; il reprend son discours du colloque Génération Jeunes Chercheurs de la semaine passée] : il faut des perspectives de debouchés et d'emploi pour les jeunes => plan décennal adopté fin 2001 (1000 emplois créés dans les EPST sur la période 2001-2004, puis 200 emplois "restitués" en 2005-2010, soit 800 créations nettes de postes d'ITA et de chercheurs). Il faut améliorer le système des allocations de recherche; l'alloc a déjà été revalorisée à 7800 F bruts au 01/01/02, ce qui fait 10000 F bruts pour les allocataires moniteurs. Il faut aller vers la parité dans les sciences; il faut notamment que les femmes puissent accéder aux meilleures responsabilités.
CEC [Fabienne]: problème de reconnaissance du doctorant, trop souvent assimilé à un étudiant attardé. Ca se traduit par la faiblesse des débouchés en entreprise; mais il faut aussi noter que l'Etat lui-même ne reconnait pas la valeur du grade de docteur, les grands corps de l'Etat étant fermés aux docteurs. Problème de financement des thèses: la revalo de l'alloc est insuffisante; il faut transformer les bourses (assos caritatives, régions...) en salaires.
J-P.A. : défaut des entreprises francaises: difficultés à innover.
G.T. : faiblesse des débouchés en entreprise liée au fait que la plupart des cadres dirigeants ne sont pas docteurs.
RGS : la nouvelle allocation que nous allons mettre en place combinera soutien financier et préparation à l'insertion professionnelle. Le développement des Ecoles Doctorales (ED) devrait permettre une meilleure insertion professionnelle.
N. Le D. : des efforts considérables pour rapprocher recherche publique et entreprises ont déjà été entrepris. Exemple des ACI [Actions Concertees Incitatives] destinées a permettre les creations d'entreprise par des chercheurs.
H.C. : les restructurations industrielles ont souvent entraîné la migration des laboratoires privés hors de France, notamment vers l'Allemagne et vers les USA; l'Union Européenne n'y prête guère attention.
P.J. : la spécificité française (écoles d'ingenieurs) pose problème pour le recrutement des docteurs dans l'industrie. Une des grandes déceptions de ces dernieres années: recherche européenne trop bureaucratique (le commissaire a la recherche actuel est très bien, mais il est empetré dans une bureaucratie tentaculaire); les réseaux européens demandent trop de travail administratif aux chercheurs. Il faut lutter contre ça. De plus, la recherche européenne est presque entièrement orientée vers les applications.
R.D. : il n'y aura pas de recherche française sérieuse sans Europe; mais la question est: quelle Europe? Il faut donner une plus grande impulsion aux UMR [Unites Mixtes de Recherche], et mener une politique de bourses à destination des pays etrangers, en particulier des pays du Sud.
J-P.A. : les programmes-cadres européens ont permis de créer des connexions entre les chercheurs de pays différents. La politique de recherche ne doit pas se limiter a la recherche, mais doit englober l'enseignement universitaire et l'innovation.
CEC : OK pour les contacts avec le privé. Les CIFRE ne nous posent pas de problème ; ce qui pose problème, ce sont les bourses. Les ED doivent favoriser les contacts public/privé, ce qu'elles ne pourront pas faire correctement si on n'augmente pas leurs moyens. Il faut favoriser les passerelles d'un secteur a l'autre; ceci passe notamment par une reconstruction correcte des carrières des Maitres de Conferences.
H.C. : Bruxelles doit être aussi utile pour les sciences que l'ont été les coopérations entre Etats.
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Ce document (/interventions/2002-salondulivre.html
) a été mis à jour le 10 juin 2007