Réunion du 12 mars 2004 au ministère de la Recherche

Compte-rendu de la réunion du 12 mars 2004 entre la CJC, le ministère de la Recherche, le ministère des Affaires Sociales et le ministère de l'Industrie et des Finances.
Vendredi 12 mars 2004, 17h-19h40


Participants

Pour la CJC :

Pour le gouvernement :


Ordre du jour


Introduction par Mme Haigneré

Mme Haigneré introduit cette rencontre en indiquant que suite au rapport sur le travail illégal parmi les jeunes chercheurs (JC) remis précédemment par la CJC, elle avait eu l'occasion de parler de la question avec un certain nombre de ces collègues, notamment dans d'autres ministères.
Mme Haigneré rappelle que des choses ont été faites, d'autres restent à faire. Elle liste alors les mesures déjà prises pour les doctorants puis pour les emplois scientifiques après la thèse.

Ces mesures sont détaillées dans ce document [pointer vers le doc en question à mettre sur le Web public], envoyé à la CJC par le cabinet du ministère après la réunion.

Mme Haigneré conclue donc qu'on ne peut pas dire qu'elle ne fait rien pour les jeunes chercheurs. Sylvain Collonge annonce que l'on reviendra plus tard sur ces mesures.


Avis des ministères sur le Rapport « travail au noir »

Sylvain Collonge synthètise donc le Rapport sur les conditions de travail illégales des jeunes chercheurs. Il termine en insistant sur le flou juridique à l'origine de cette situation.

Réaction du ministère de la Recherche

Les représentants du ministère de la Recherche contestent l'ordre de grandeur des chiffres évoqués dans le rapport (environ 10 000 personnes concernées). Ils insistent sur l'ambiguité de la définition de ce qui est compris dans ces « jeunes chercheurs en situation illégale ». Selon eux, le nombre de personnes concernées seraient au plus de l'ordre du millier.

Une discussion s'ensuit sur cette évaluation. Il en ressort que la tâche n'est pas aisée étant donné notamment l'arrêt de la publication des chiffres sur la formation doctorale par le ministère, le manque de précision des nomenclatures ministérielles (le problème de la définition de la catégorie « salariés » à titre d'exemple) et le faible taux de remontée des données. Le problème de la quantification est encore plus important pour les chercheurs « post-doc » puisqu'aucun outil de quantification n'existe.
Claudie Haigneré conclut cet échange en soulignant la mise à jour d'une lacune importante du système, sur lequel elle demande de se pencher.

Sylvain Collonge poursuit en soulignant le cas des jeunes chercheurs étrangers et l'opacité de l'association Égide qui gère un grand nombre de financements pour cette population. Egide a refusé de communiquer ses données à un député auprès de qui la CJC avait déposé une demande.
Claudie Haigneré demande à ses collaborateurs qu'un courrier officiel à sa signature soit envoyé au Ministère des Affaires Étrangères pour avoir ces informations.
Elle demande ensuite à ce que les représentants des autres ministères s'expriment sur le Rapport de la CJC.


Réaction du ministère de la Fonction Publique

Véronique Gronner demande à apprécier concrètement l'ampleur quantitative du sujet, et voir plus précisément les cas. Il s'agit pour elle d'établir le dispositif juridique pour asseoir la protection sociale. Jean-François Crevel note que cette question s'inscrit parfaitement dans les débats actuels sur les contrats de la fonction publique.

Véronique Gronner indique une piste pour mettre en place les outils juridiques adéquats : le statut de contractuel de droit public à durée déterminée semble une piste crédible. Il s'intègrerait bien dans un projet de loi qui toucherait aux agents non titulaires, actuellement discuté au conseil supérieur de la fonction publique avec les syndicats. Il s'agit d'une transposition d'une directive européenne de 1998. Les durées envisagées correspondraient aux cas qui nous concernent : durée maximale de 18 mois pour un contrat, renouvelable une fois, soit un total de 3 ans, ce qui correspond à la durée « officielle » de préparation d'un doctorat.

Mme Gronner complète en expliquant que pour certaines catégories de personnels aux fonctions de haute technicité (catégorie A par exemple), le dispositif pourrait prévoir un dépassement de cette durée de 3 ans, jusqu'à un maximum de 5 ans [ou 6 ans ?].
M. Delevoye doit faire une communication en mars au sujet de ce projet au conseil des ministres. L'objectif est un dépôt du projet de loi avant la fin du 1er semestre.


Réaction du ministère de l'Industrie

Boris Walbaum félicite la CJC pour son travail de bonne qualité et déclare que le Minefi est très préoccupé. Il signale la détermination politique de M. Mer et Mme Fontaine qui s'intéressent de près à la recherche, notamment dans les entreprises et en faveur d'un effort pour l'attractivité du doctorat. 

Boris Walbaum évoque l'intérêt d'une comparaison avec d'autres pays, notamment en Europe. Une discussion rapide s'engage sur ce point.

Puis Boris Walbaum revient sur le rapport et tente de minimiser son impact en considérant qu'il s'agit plus d'un point de vue que d'une analyse tout à fait objective. Selon lui, on ne peut pas évacuer le fait que le doctorant est un étudiant. Le lien de subordination resterait alors assez flou. On ne pourrait donc pas vraiment parler de travail au noir...
Sylvain intervient pour dire que dans le cas qui le concerne principalement, celui des Écoles des Mines, la situation est au contraire très claire... et Ronan propose alors à M. Walbaum de demander l'avis de l'URSSAF pour compléter le nôtre...
M. Walbaum esquive et réaffirme alors que le Minefi est très ouvert notamment pour discuter de l'emploi en entreprise, de la reconnaissance du doctorat, etc. M. Cervel souligne qu'il faudrait faire un point sur ces sujets avec l'Association Bernard Grégory (ABG).

Mme Haigneré, qui doit nous quitter, demande à ce que soit défini dans le reste de la scéance la méthodologie, un calendrier, et les thèmes sur lesquels une collaboration sera à mener. Elle quitte la réunion.


Valorisation du doctorat

M. Cervel reprend la conversation en insistant sur la collaboration à mener avec l'ANRT et l'ABG.

M. Walbaum rappelle que le Minefi est prêt à une proche collaboration pour nous aider à avoir des contacts pour la valorisation du doctorat et renouveler le lien entre la recherche et l'entreprise.

Mme gronner et M. Walbaum s'en vont. La discussion se poursuit avec MM. Cervel et Eddi.

Pour travailler sur la question de la valorisation du doctorat, une concertation avec la Guilde, l'Andès, la CJC, les ministères et des représentants du tissu économique est évoquée. Le principe semble acquis.


Retour sur le rapport « travail au noir » et conséquences

Jean-François Cervel revient sur l'importance de la clarification du dossier. Sylvain Collonge souligne que dans tous les cas il faut veiller à ce que les chercheur « post-docs » travaillent sous contrat, car pour eux la situation est claire. Un post-doc se caractérise par un travail de recherche à temps plein, appelant en conséquent rémunération sous forme d'un salaire, quelque soit la discipline. Quel que soit le nombre de personnes en jeu, il s'agit toujours de travail illégal.

Sylvain Collonge explique qu'au delà de la régularisation nécessaire des situations actuelles, il ne faut pas perdre de vue la mise en place d'un cadre visant à empêcher de nouvelles dérives.

Michel Eddi remarque que s'opère la délimitation de deux catégories: les doctorants salariés (pour leur travail de recherche) et ceux qui ne le sont pas. Nous complétons alors en estimant que cette situation de non-financement devra être résorbée ensuite par des processus d'incitation.

Ces questions induisent un problème de gestion des flux. Une discussion s'engage alors où les représentants de la CJC expliquent qu'il existe déjà implicitement une sélection à l'entrée du doctorat (notamment dans la Charte des thèses à travers les indications de limitation de doctorants par encadrant, de moyens mis à disposition du doctorant pour faire ses recherche, par les recommandations en terme de financement). Il est également précisé qu'il faut distinguer la formation initiale et la formation continue. Concernant la formation initiale, le recrutement d'un doctorant doit s'établir dans le cadre d'une politique de recherche, et il n'est pas sain, y compris pour les laboratoires, d'accepter n'importe qui en doctorat sous prétexte que la personne « en a envie ».
J-F. Cervel indique qu'il préfère laisser ce type de démarche aux structures, plus aptes à faire du cas par cas et à juger des capacités scientifiques et de la possibilité de certains à travailler sans financement. La question se pose alors de savoir comment responsabiliser les structures. Le rôle du conseil des écoles doctorales (ED) doit en particulier être renforcé.


Dossiers en cours avec la DES

J-F. Cervel enchaine sur le suivi de la Charte des thèses. M.  Korolitski doit faire un point avec la DES (Direction de l'Enseignement Supérieur) avant le lancement de la prochaine campagne d'enquête auprès des écoles doctorales. Un avis sur le questionnaire à mettre en place sera demandé à la CJC dans les deux prochains mois.

La représentation des Jeunes Chercheurs dans les instances universitaires est ensuite abordée. M. Cervel répond qu'il s'agit de problèmes de gouvernance des établissements et que le sujet est complexe. Le dossier doit continuer à avancer avec la DES.


Les 550 CDD...

La CJC interroge alors M. Cervel à propos des 550 postes en CDD.
Les réponses de MM Cervel et Eddi ont permis de clarifier plusieurs choses.

Ce qu'il faut donc retenir, c'est que ces 550 CDD sont « virtuels », puisqu'il s'agit en réalité d'une enveloppe budgétaire allouée aux organismes de recherche (EPST) pour que ceux-ci puissent recruter en toute liberté.

Dire qu'il s'agit de 550 CDD répartis en 200 postes de chercheurs et 350 d'ingénieurs, avec un niveau de rémunération correspondant au niveau d'entrée dans la grille du corps en question, n'est qu'une manière de répartir cette enveloppe.

Les organismes gèrent ces supports comme bon leur semble, et peuvent abonder en ressources propres. Ils peuvent par exemple lier un certain nombre de « postes » pour recruter un spécialiste qui couterait bien plus cher que les grilles traditionnelles de l'établissement. Il n'y a non plus aucune obligation concernant le taux d'embauche de jeunes chercheurs ou de seniors confirmés, contrairement à la communication officielle antérieure du ministère. Il n'y a enfin aucune directive concernant la ventilation entre postes d'ingénieurs et postes de chercheurs.

Concernant la perspective pluri-annuelle de ce budget, J-F. Cervel explique qu'il faut une dose de flexibilité budgétaire, et déterminer le point d'équilibre entre personnels permanents et recrutements souples.

À propos des +30% annoncés par Mme Haigneré, la réponse est clairement qu'il s'agit d'un pur artifice de communication. Il ne peut s'agir que d'une « recommandation » de la part du ministère, puisqu'aucune enveloppe supplémentaire n'a été débloquée. Les organismes feront exactement ce qu'ils voudront avec l'enveloppe allouée.

Concernant le planning d'application de cette mesure, M. Eddi confirme que les sommes ont été budgétées au 1er janvier 2004. Les EPST peuvent commencer les recrutements.


La discussion a glissé vers la diminution des postes statutaires et « l'ajout » de 120 postes décidé suite à la mobilisation des chercheurs.
MM. Cervel et Eddi confirme notre analyse consistant à dire qu'il n'y a eu aucune création supplémentaire, puisqu'il s'agit de faire glisser des emplois gagés pour en faire des supports de postes stables, technique ne pouvant fonctionner évidemment qu'une seule fois. Ils confirment également que le CNRS a compensé la diminution de postes permanents dès le départ (avant la mobilisation des chercheurs) en ayant recours à cette technique.


Transformation des libéralités en salaires

À propos du protocole d'accord visant à transformer des libéralités en salaires, la question est réglée avec la Ligue contre le Cancer pour le premier contingent de 35 doctorants. La CJC souligne l'existence d'un second contingent en cours d'année (septembre). Il est entendu que le deuxième contingent entrera également dans le dispositif.

Pour l'ARC, les négociations ont abouti et environ 130 bourses sont transformées en salaires pour cette année.

Concernant le FRM les négociations sont toujours en cours pour une cinquantaine de cas pour une mise en place au 1er septembre prochain.

Par contre, les discussions sont moins avancées avec l'AFM. D'autres associations, plus petites, ont contacté le Ministère afin d'entrer dans le dispositif. Nous mentionnons le cas de Ensemble contre le Sida qui désire entrer dans le dispositif au plus vite.

Interrogé sur la poursuite de l'effort pour le prochain budget, M. Eddi répond qu'ils visent un doublement du nombre de prises en charge par l'État afin d'atteindre 600 personnes, ce qui d'après eux permettra de couvrir l'ensemble des doctorants financés par les 4 associations concernées.

Lors de cette discussion sur la préparation du budget 2005, nous apprenons qu'une nouvelle revalorisation de l'Allocation de Recherche est actuellement en discussion avec le Minefi.

M. Cervel nous indique qu'il nous enverra un bilan écrit de cette réunion mentionnant les thèmes de travail pour les réunions à venir. Ce document, signé de Mme Haigneré nous est parvenu vendredi 18 mars.